Dans les pas de Miss.Tic, artiste rebelle
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Mise à jour le 18/07/2023
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Pochoirs de grandes silhouettes brunes, slogans poétiques et percutants… Depuis les années 80, les œuvres de Radhia Novat, dit Miss.Tic, s'observent au détour d'une rue ou d'un mur de la capitale. Un style inimitable, qui témoigne de la présence parisienne de l'artiste, disparue en mai dernier.
Miss Tic est née dans les
rues de Paris, sur les hauteurs de la Butte Montmartre (18e). Le 20
février 1956, la petite fille aux origines tunisiennes et normandes est prénommée Radhia Novat. Son enfance est
marquée par deux événements tragiques : un accident de voiture,
qui tue sa mère, son frère et sa grand-mère en 1966 alors qu’elle n'a que 10 ans, et la mort de son père, décédé d’une crise cardiaque, qui laissent
l'artiste orpheline à l'âge de 16 ans.
La naissance d'une artiste de rue
Son attachement à l’art lui vient de sa famille maternelle, et d’un
souvenir de jeunesse qu’elle chérit particulièrement : sa mère l’emmène boulevard Rochechouart (18e) et lui offre
son premier livre, « Paroles » de Jacques Prévert. L’édition,
illustrée d’une œuvre de l’artiste Brassaï, lui plait immédiatement.
Des années plus tard, la jeune artiste ne cesse de mêler
ces deux disciplines, inscrivant sur la pierre l'art et la poésie. Sa griffe artistique se révèle lors de ses études de graphisme et de ses premiers jobs, dans les
décors de théâtre. Miss.Tic se prête au jeu de la comédie : elle intègre la
compagnie de théâtre de rue « Zéro de conduite » pendant quelques années.
Tatouer la ville
Après un séjour de quelques années aux USA, Miss.Tic retrouve
la capitale, qui l’a vue grandir, en 1985. L’artiste se remet difficilement d’une
déception amoureuse. Nourrie de sa découverte du milieu urbain américain, Miss.Tic revient en terre parisienne avec de nouvelles aspirations.
Finalement,
et comme pour faire taire l'ancien amant qui lui avait dit ne « plus vouloir la voir en
peinture », la peintre rebelle se met à créer des pochoirs à son effigie. Ses autoportraits prennent rapidement place dans les rues de Paris, accompagnés de légendes aussi provocantes que drôles.
Paris, plus
belle galerie du monde
Son nom fleurit rapidement dans tout Paris. Un pseudonyme
qu’elle emprunte au journal de Mickey, et à la fameuse sorcière Miss Tick qui
tente par tous les moyens de voler l’or de l’oncle Picsou. De la sorcière, la
Parisienne en garde l’allure et le charme, mais Miss Tic, sans le
« k », représente bien plus qu’un personnage de bande dessinée.
En
taguant sa signature à la bombe aérosol noire, l’artiste affirme sa
différence : dans le milieu masculin de l’art urbain, la
« Miss » s’est fait une place. Fidèle à son habilité de manier la
langue, Radhia Novat protège aussi son identité en s'en choisissant une plus…
mystique.
Dans les années 80, en pleine ébullition de l’art
urbain, Miss.Tic fait de la Butte aux Cailles (13e) son terrain de
jeux. Mais la street-artiste ne se contente pas seulement de l’extérieur, et
ses œuvres envahissent aussi l’intérieur. Elle expose pour la première
fois en 1986 à la galerie du Jour d’Agnès b, dans le 13ème arrondissement.
Une artiste connue de la justice
Appréciées par les habitants du quartier, les
œuvres de Miss.Tic n’en restent pas moins illégales aux yeux
de la loi. En plaisantant, la Parisienne affirme tout haut que la justice est
la seule à connaître sa véritable identité, qu’elle est obligée de décliner lors
de ses nombreuses gardes à vue.
En 1997, l’artiste paye le prix fort en écopant d'une amende de 22 000 francs pour vandalisme. Elle est même prise en flagrant délit lorsqu'elle tague son œuvre « Égérie et j’ai pleuré » sur un mur du Marais. Cette histoire lui sert de leçon, et la street-artiste
change de technique en demandant désormais l’autorisation préalable des
propriétaires et des municipalités avant de taguer.
Il n'y a plus que le fisc et les flics qui connaissent ma véritable identité.
artiste parisienne
Des grands noms de la mode aux timbres collectors
Les années 2000/2010 amènent Miss.Tic en haut du podium, et l’artiste
découvre d’autres genres artistiques avec des collaborations dans le milieu de
la mode. Ses pochoirs se retrouvent sur des tee-shirts et des cartons d’invitations,
pour des grands noms comme Vuitton ou Kenzo.
Elle franchit les frontières du 7e art en 2007, lorsque le réalisateur Claude Chabrol lui demande de réaliser l’affiche
de son futur film, « La fille coupée en deux ».
Quatre ans plus tard,
en 2011, Miss.Tic est sollicitée par La Poste pour réaliser douze timbres
collectors, publiés à l'occasion de la Journée internationale des droits des
femmes, le 8 mars.
À jamais dans la pierre
Atteinte d’un cancer, Miss.Tic est décédée le 22 mai 2022, à
66 ans, laissant derrière elle de nombreuses traces de son passage dans Paris.
Dans le 5e arrondissement, la
question se pose à présent de lui rendre hommage : une place, située non loin de la rue Buffon (l'artiste a vécu au numéro 71), devrait
prendre son nom.
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